Pour des lieux publics intensifiés
Un mètre carré d’équipement public à usage unique représente une gabegie énergétique et une contribution malvenue au réchauffement climatique. Or, on en connaît qui ne sont même pas utilisés une heure par jour. Faute d’en avoir pris conscience plus tôt, c’est par la facture que l’embonpoint nous saute aux yeux (et, donc, au portefeuille), avec des conséquences potentiellement catastrophiques sur l’accès aux services publics (les universités, les gymnases…) et les finances publiques.
Un mètre carré d’équipement public devrait avoir mille vies par semaine. Le compte n’y est pas : les maîtrises d'œuvre montrent peu d’intérêt pour l’intensité d’usage et les belles intentions de départ en matière de mutualisation interservices sombrent presque toujours dans les chamailleries territoriales. À la fin, chacun sa salle.
On ne pouvait pas se le permettre, mais on faisait semblant de ne pas le voir.
Il n’est plus envisageable de faire semblant. Nous adorons, chez Vraiment Vraiment, les missions de (re)programmation d’équipements publics, pour jouer au tétris et chasser au sein d’une semaine type les trous qui diminuent l’utilité d’un lieu pour ses publics (avérés ou potentiels) sans réduire la facture. En la matière, comme en d’autres, la technologie peut aider, pour suivre par exemple la consommation en temps réel d’un bâtiment. Mais le bâtiment vraiment vraiment intelligent, c’est surtout celui dont la gestion repose sur l’expertise de ses agents (vive les gardien·ne·s !) et de ses usagers. Dont les règles d’usages entre acteurs aussi variés qu’un centre social, un incubateur de PME, un cinéma municipal ou une crèche sont élaborées et gérées comme celles d’une coloc.
Si nous ne voulons pas que, partout en France, des enfants soient privés de piscine ou de sport, que les étudiants qui croyaient être sortis du distanciel par défaut soient forcés d’y revenir, bref, si nous ne voulons pas que les services publics tirent le rideau alors que nous en avons plus besoin que jamais, il est temps de repenser nos équipements publics, d’arrêter de se faire vendre du béton, et de penser intensification des usages plutôt que multiplication des inaugurations.
Pour poursuivre cette réflexion, nous vous invitons à nous rejoindre le 29 novembre prochain lors d’un événement dédié qui réunira gestionnaires d’équipements, chercheurs, designers et programmistes. Rendez-vous à 18h à Césure, dans le 5e arrondissement de Paris, au cœur du nouveau site d’occupation transitoire de Plateau Urbain ; où nous avons installé nos bureaux pour les prochaines années ! Plus d’informations à venir très prochainement, inscrivez-vous pour les recevoir :
On a vraiment vraiment aimé
_ Agir avec Bruno Latour. Nous avons appris avec une grande tristesse son décès le 9 octobre dernier. Le 9 mars 2021, nous avions eu la chance d’échanger avec Maÿlis Dupont, Baptiste Perrissin-Fabert et lui-même, pour chercher les ponts et le commun entre sa pensée, ses actions et celles d’agents publics, de designers, de chercheurs et praticiens politiques. Nicolas Rio et Mathilde François, de l’agence Partie Prenante, en ont tiré deux textes stimulants qui sont autant de pistes pour continuer à faire vivre la pensée de Bruno Latour par l’action : (1) Ré-apprendre à faire territoire, (2) Ré-apprendre à faire politique.
« Je ne crois pas que le rôle d’un philosophe soit d’ajouter aux innombrables larmes que versent les collapsologues et les catastrophistes, mais au contraire de travailler à redonner des puissances d’agir. »
— Bruno Latour (Le Monde)
_ Dessiner le futur pour mieux agir aujourd’hui. Trois publications récentes valorisent, chacune à leur manière, les richesses du design fiction. L’équipe du Near Future Laboratory propose de revenir sur les origines, l’évolution et les pratiques de cette discipline dans un très complet Manual of Design Fiction.
Imaginaires, prototypes spéculatifs… Quelles techniques sont nécessaires à la mise en œuvre d’une approche de design fiction ? Le collectif Making Tomorrow fait le point sur sa pratique et ses apprentissages issus du terrain dans son Manuel pour apprivoiser le futur avec l'aide du Design Fiction.
Partant du constat que penser concrètement les temps à venir est une pratique trop complexe et rare, les designers Filippo Cuttica et Stuart Candy publient, avec le soutien de la BBC et du Situation Lab, The Futures Bazaar: A Public Imagination Toolkit. Un kit d’outils clés en main téléchargeables gratuitement pour animer ateliers, discussions et autres réflexions stratégiques.
_ Quand Google Maps se trompe. L’outil de navigation de la firme de Mountain View n’est pas infaillible. Et lorsqu’il dirige ses utilisateurs vers une voie piétonne, un chemin privé ou encore un cul-de-sac, cela a le don d’agacer les riverains concernés. Quand signaler l’erreur via le formulaire dédié (encore faut-il connaître leur existence…) ne suffit plus, ces derniers redoublent de créativité pour tenter de neutraliser la technologie. Et quoi de mieux que des panneaux physiques ? Jules Grandin en a compilé plusieurs dizaines. On adore.
_ Parcourir la première édition de l’atlas IGN des cartes de l'anthropocène. Un projet qui vise à « produire des cartes thématiques sur un nombre limité d’enjeux écologiques majeurs qui rendent compte des changements rapides du territoire et des conséquences sur l’environnement. » Une connaissance plus que jamais nécessaire pour faire face à la multiplication des aléas climatiques. Ce numéro revient notamment sur les enjeux technologiques de cartographie des changements et de production des cartes.
_ La Lyonnaise des eaux, nouvelle génération. Finie la délégation de service public. La Métropole de Lyon l’a annoncé : à partir de 2023, l'eau sera gérée par une nouvelle régie publique. Une manière de remettre la main sur un bien commun hautement stratégique dans les années à venir et de redonner une place aux citoyens dans sa gestion. Toutes les explications en vidéo avec Anne Grosperrin, vice-présidente de la Métropole, dans un entretien accordé à Lyon Capitale.
_ L’éloge de la maintenance. Une activité profondément politique, mais dont l’invisibilisation peut conduire à des catastrophes industrielles et humaines, comme l’accident ferroviaire de Brétigny. Jérôme Denis, professeur de sociologie à Mines Paris-PSL, et David Pontille, directeur de recherche au CNRS, viennent de publier Le soin des choses. Politiques de la maintenance (La Découverte). Qui sont ceux qui la font et la pensent ? Avec quels moyens ? Quels enjeux éthiques et politiques ? Une subtile et passionnante recherche qu’ils présentent dans un entretien à Usbek & Rica.
_ Faire la fête. Et si nous repensions l'espace public et les politiques publiques en se donnant pour ambition d'améliorer l'ambiance générale ? Ce n'est qu'une des idées réjouissantes du petit livre de Vito Marinese, Pour un parti de la fête (Hic et nunc), dont on ne peut que conseiller la lecture tant elle est stimulante. À la veille du mois de l'innovation publique, cela donne envie d'en faire un manifeste et d'organiser la fête du service public. Pour le plaisir d'être ensemble et de préparer, peut-être, un avenir joyeux. On en a besoin, non ?
On l’a vraiment vraiment fait
Simuler la consultation de demain. À l’heure de l’expansion de la télémédecine, l’expérience de consultation en santé, physique ou à distance, évolue. Nouveaux besoins, nouvelles attentes, nouveaux outils… Pour le corps médical comme pour les patients, tout change.
Dans le cadre du plan de rénovation des hôpitaux de Paris, l’équipe innovation de l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP) nous a sollicité pour concevoir le parcours de la consultation de demain. Un travail de redéfinition des parcours, des espaces et plateaux de consultation et de réflexion sur les outils de médiation à même d’autonomiser les patients. L’ambition ? Placer le relationnel au cœur de l’expérience de consultation.
Trois immersions au sein de différents services – santé sexuelle, permanences d'accès aux soins de santé (PASS), cardiologie – et une analyse fine des besoins des soignants et des patients, nous ont convaincus que la consultation de demain ne sera un succès que si et seulement si ces derniers ont compris la consultation, sont écoutés et autonomes pour être à la manœuvre de leur parcours de santé. Ce qui implique de repenser le box de consultation comme un espace d’interaction et non plus seulement de travail, de créer un nouveau parcours à l’intérieur de l’établissement pour, par exemple, disposer d’un espace de post-consultation pour préparer la suite, et enfin de mettre à la disposition des patients des outils pour mieux les informer sur leur parcours.
Nous avons eu à cœur de rapidement mettre à l’épreuve ces principes et hypothèses de manière concrète. Un démonstrateur à taille réelle – que vous pouvez apercevoir ci-dessous – a été produit à l’occasion du Forum de la santé connectée, à l’Hôtel-Dieu de Paris, pour se confronter à l’expérience des professionnels de santé. Prototyper les projets à l’échelle 1:1 et les mettre à l'épreuve du terrain et des professionnels nous a permis de dépasser les discours d'intention et d'affiner le cahier des charges de la consultation de demain. De quoi inspirer et influer de manière tangible sur le projet de rénovation des hôpitaux de Paris qui se dessine pas à pas !
Merci de nous avoir lu jusque-là ! On vous donne rendez-vous dans un mois (ou presque). D’ici là, gardez toujours en tête le sens de tout ça.
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